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L'Union européenne et l'immigration
L’immigration en Europe revient sur le devant de l’actualité ces dernières semaines… Crise migratoire en Grèce, conflits avec la Turquie, responsabilités partagées… Nous profitons du contexte actuel pour faire un point sur la politique migratoire de l’Union européenne et les rôles respectifs des Etats membres et des institutions européennes.
Quelques mots clés
- Un migrant est défini par l’Unesco comme une « personne qui vit de façon temporaire ou permanente dans un pays dans lequel il n’est pas né » et « qui a acquis d’importants liens sociaux avec ce pays ». Dans ce pays, ce migrant peut être considéré comme légal ou illégal.
- Un demandeur d’asile est une personne qui sollicite une protection internationale hors des frontières de son pays, mais qui n’a pas encore été reconnue comme réfugié. La personne craint d’être persécuté pour des motifs de « race », ethnie, religion, nationalité, groupe social ou opinions politiques.
- Un réfugié est une personne ayant obtenu l’asile politique.
Démographie et immigration
Sur 512,4 millions d’habitants, l’Union européenne comptait 22,3 millions de citoyens non-européens au 1er janvier 2018, soit 4,4 % de sa population.
En 2018, 17,6 millions de personnes résidant dans l’un des pays de l’Union européenne avaient la nationalité d’un autre État membre.
Une grande partie de tous ces non-nationaux (citoyens européens ou non) résidait en Allemagne (9,7 millions), tandis que le Royaume-Uni, l’Italie, la France et l’Espagne en enregistraient chacun entre 4,5 et 6,5 millions.
En France, les étrangers représentent 12,2 % de la population.
Chaque année, le nombre d’arrivées vers l’UE est plus important que le nombre de départs. En 2018, il y a eu 1,5 million de personnes de plus qui sont entrées dans l’UE que de personnes qui en sont sortis.
Par ailleurs, même s’il y a eu plus de décès que de naissances en 2017 et 2018 dans l’UE, la population de l’Union européenne a tout de même augmenté. La croissance démographique européenne est principalement causée par l’immigration depuis le début des années 1990.
3 types d’immigration existent
Mais qu’est-ce qui relève de la compétence de l’UE et qu’est-ce qui relève des Etats membres ?
1. Migration légale
Immigration légale : un citoyen d’un pays tiers qui rentre dans le territoire d’un pays de l’Union européenne de façon légale suite à une demande de visa ou permis de séjour.
- Pour des périodes de moins de 90 jours, les visa Schengen permettent de circuler entre les pays qui font parti de l’espace Schengen (26 pays européens de l’UE et hors UE) qui n’ont pas de contrôle aux frontières entre eux. (Certains pays sont dispensés de visas).
- Pour plus de 90 jours, en fonction du demandeur, la réglementation européenne ou de l’Etat membre s’applique.
Le rôle de l’UE :
Elle établit une procédure de demande unique afin de simplifier les procédures d’admission et faciliter le contrôle de leur statut et délivre un permis unique. Le permis unique est une autorisation combinée de séjour et d’occupation, octroyée aux non-ressortissants de l’UE pour pouvoir séjourner et travailler légalement dans le pays.
Elle établit aussi un socle commun de droits pour les travailleurs issus de pays tiers qui résident légalement dans un État membre en matière de conditions de travail, de sécurité sociale et d’accès aux services publics.
Ces règles n’affectent pas le pouvoir des pays de l’UE de décider d’accueillir – ou non – des travailleurs non-communautaires ou de fixer le nombre de ressortissants de pays tiers.
Pour certaines catégories de personnes, l’UE défini les conditions d’entrée et de séjour :
- Travailleurs hautement qualifiés : la carte bleu européenne autorise les travailleurs non-ressortissants de l’UE à séjourner et travailler dans un pays de l’UE (ils doivent avoir un diplôme universitaire et un contrat de travail ou une offre d’emploi ferme, avec un salaire élevé par rapport à la moyenne du pays de l’UE)
- Des transferts temporaire intragroupe : personnes originaires de pays tiers qui ont un contrat de travail avec une entreprise établie en dehors de l’UE et qui sont transférées temporairement dans une ou plusieurs succursales de cette entreprise dans un ou plusieurs pays de l’UE
- Chercheurs : Individus souhaitant mener un projet de recherche dans un pays de l’UE pendant plus de trois mois et ayant signé un contrat d’accueil avec un organisme de recherche agréé.
- Étudiants : admis dans un établissement d’enseignement supérieur pour y suivre un programme de cours complet dans un pays de l’UE
- Stagiaires, élèves participant à un programme d’échange et bénévoles non-rémunérés
Le rôle des Etats membres :
Chaque pays décide seul :
- du nombre total de migrants en recherche d’emploi pouvant être admis sur son territoire
- de toutes les réponses finales apportées aux demandes d’immigration qu’il reçoit
- des conditions d’obtention d’un permis de séjour ou de travail sur son territoire lorsque aucune règle européenne n’a été adoptée
2. Demandeurs d’asile et réfugiés : personnes en danger
Le processus de demande d’asile est harmonisé dans l’UE. Cependant, la distribution des demandeurs d’asile, en théorie aussi harmonisée par l’UE, est plutôt traitée individuellement par les pays-membres.
L’UE : la théorie
L’harmonisation de la distribution des demandeurs d’asile est établie par les accords de Dublin. Selon cet accord, les demandeurs d’asile doivent faire leur demande sur le territoire du premier pays de l’UE qu’ils touchent. Par exemple, une personne qui arrive en de Syrie, via la Turquie, en Grèce, devra faire sa demande d’asile en Grèce.
Cet accord, suffisant dans les années 90, a montré ses limites en 2013-2015, avec la forte pression migratoire touchant les pays du Sud de l’Europe tels que la Grèce, l’Italie, la France et l’Espagne. L’accès à la méditerranée est une élément essentiel pour comprendre ceci, car la majorité des demandeurs d’asile en Europe arrive par la mer.
L’Union européenne a donc décidé de revisiter les accords avec les règlements Dublin II et III, adoptés en 2013. Ces deux accords ont visé instaurer plus de coopération entre les pays membres pour mieux harmoniser les demandes d’asile, en considérant les vœux des demandeurs, mais aussi la capacité de chaque pays.
Les Etats membres : la pratique
Néanmoins, dans la pratique les choses sont drastiquement différentes. L’Union européenne n’arrive pas à mettre en oeuvre cette harmonisation au niveau de la politique d’asile. Les pays-membres peuvent, pratiquement, arrêter d’accorder l’asile unilatéralement. Le sud accueille beaucoup plus de demandeurs d’asile, en comparaison avec la population locale, que le nord. Certains pays ont même fermé leurs frontières à un moment, comme la Hongrie.
La Grèce, a même suspendu le droit d’asile, depuis début mars, et pour un mois.
L’harmonisation lancée à Dublin, n’est malheureusement pas respectée. Beaucoup de libertés sont laissées aux pays membres, en particulier pour décider du nombre de demandes qu’ils vont traiter et éventuellement accepter.
3. L’immigration illégale
Les principaux facteurs de migrations sont économiques (misère, chômage), climatiques (désertification, montée des eaux, disparition des ressources naturelles), sociaux (regroupement familial), politiques (conséquences du « Printemps arabe » par exemple ou conflits armés), ethniques ou encore religieux.
A cause des contrôles des flux migratoires qui se sont renforcés depuis les années 1980, l’illégalité est devenue une option durable pour les migrants à l’échelle de la planète et plus particulièrement en Europe. Beaucoup d’illégaux se risquent à traverser la Méditerranée au péril de leur vie.
Le rôle de l’UE
Des accords bilatéraux ont été signés avec l’Albanie, la Turquie, la Libye… – pays tampon – complétés par des accords de réadmission – pour lutter contre l’immigration clandestine et répondre aux besoins saisonniers de main d’œuvre.
L’Union européenne a créé en 2004, l’Agence européenne pour la gestion de la coopération opérationnelle aux frontières extérieures des États membres de l’Union, plus communément appelée Frontex, afin de gérer de manière intégrée les frontières extérieures des États membres de l’Union européenne et aider à garantir la liberté de circulation sans contrôle aux frontières intérieures.
Les Etats membres demandent l’assistance de Frontex dans la coordination des opérations de rapatriement de migrants irréguliers, de demandeurs d’asile déboutés ou de personnes dont le titre de séjour a expiré, vers leurs pays d’origine. Dans les dernières années, le nombre de personnes concernées est passé de 3 500 en 2015 à environ 14 000 en 2017. Aujourd’hui, Frontex assure son soutien à près de 10 % de tous les retours effectifs de l’UE.
Vers une nouvelle crise migratoire ?
Depuis mars 2016, l’Union européenne et la Turquie sont liées par un accord suite à la crise migratoire. Ankara s’était alors engagée à exercer des contrôles plus stricts à ses frontières pour juguler l’immigration illégale en coopération avec Frontex ainsi qu’à accueillir tous les migrants illégaux venus de son territoire et arrêtés en Grèce. Pour chaque Syrien renvoyé vers la Turquie au départ des îles grecques, un autre Syrien serait réinstallé de la Turquie vers l’Union européenne, dans la limite de 72 000 personnes maximum.
En retour, l’UE s’engageait à accélérer le versement du montant de 3 milliards d’euros initialement alloué pour la gestion des réfugiés en Turquie et financer d’autres projets en faveur de personnes bénéficiant d’une protection temporaire en Turquie, pour 3 milliards d’euros supplémentaires jusqu’à fin 2018. Par ailleurs, les citoyens turcs n’auraient plus besoin de visas pour se rendre dans un pays de l’Union européenne. Enfin, l’UE et la Turquie confirmaient leur volonté de relancer le processus d’adhésion avant fin juin 2016.
Cet accord a d’abord été appliqué scrupuleusement et efficacement par les autorités turques. Le nombre de migrants illégaux passant de 3500 par jour à 40. Mais trois ans après son entrée en vigueur, seuls 1 843 migrants avaient été renvoyés en Turquie alors que le texte prévoyait jusqu’à 72 000 retours. Par ailleurs, l’Union européenne a bien débloqué les deux tranches de trois milliards d’euros dévolues à la gestion des réfugiés en Turquie et à des projets pour l’insertion de ceux qui bénéficient d’une protection temporaire de la part d’Ankara, mais ces financements ont souvent transité par des ONG et non par l’Etat turc directement.
Mécontent du manque de soutien européen dans sa guerre contre le régime de Damas appuyé par l’aviation russe, Erdoğan a donc mobilisé l’arme migratoire et mis sa menace d’ouvrir sa frontière avec la Grèce à exécution fin février.
Rédacteur : CRIJ - Angela L.
Date création : 11/03/2020
Mots clés : immigration, UE