Journée internationale des droits des femmes : Europe, crise du Covid-19 et inégalités femmes-hommes

Journée internationale des droits des femmes : Europe, crise du Covid-19 et inégalités femmes-hommes
M. Sassoli, Mme Ardern, Mme Harris et Mme von der Leyen ont rendu hommage aux femmes en 1ère ligne dans la crise du COVID-19. © EU 2021-EP

La Présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen a dédié cette Journée internationale des droits des femmes du 8 mars 2021 aux femmes qui sont en première ligne dans la crise sanitaire, aux travailleuses de la santé, aux vendeuses qui permettent aux supermarchés de rester ouverts, aux mères qui s’occupent de leurs enfants tout en travaillant à domicile et à celles qui ont perdu leur emploi. Elle a réuni pour l’occasion en visioconférence la Première ministre néo-zélandaise Jacinda Ardern et la nouvelle vice-présidente des États-Unis Kamala Harris au Parlement européen afin d’envoyer un message fort aux femmes du monde entier.

Dans cet article, nous revenons sur les progrès en matière d’égalité hommes-femmes faits grâce à la juridiction européenne et sur les défis que représente la crise sanitaire pour ces avancées.

Le cadre juridique de l’UE en matière d’égalité femmes-hommes

Le traité de Rome, le socle juridique en la matière

Depuis 1957, le Traité de Rome fait de l’égalité entre les femmes et les hommes une valeur fondamentale de l’UE. Cette notion apparait à l’article 2 du traité sur l’Union européenne, en vigueur actuellement. C’est ce même Traité de Rome qui établit le principe de salaire égal pour travail égal, un engagement qui est lui repris dans le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE). Enfin, le TFUE indique que l’Union peut adopter des lois en vue de lutter contre toutes les discriminations, dont font partie les discriminations fondées sur le sexe.

Chronologie des avancées de l’Union en matière d’égalité femmes-hommes

La défense de l’égalité entre hommes et femmes par l’Union européenne a progressé de plusieurs façons : à travers des lois, des chartes et déclarations et une adaptation des institutions.

  • 1975 : L’UE adopte sa première directive européenne contre la discrimination salariale le 10 février 1975. Elle oblige les Etats membres à transposer dans leurs législations un certain nombre de dispositions « relatives à l’application du principe de l’égalité des rémunérations entre les travailleurs masculins et les travailleurs féminins« .
  • 1984 : La Commission des droits des femmes et de l’égalité des genres est instituée au Parlement européen. Elle est actuellement présidée par la députée social-démocrate Evelyn Regner (Autriche). Cette commission permanente est chargée d’examiner toutes les propositions d’actes législatifs relatifs aux droits des femmes.
  • 2000 : La Charte des droits fondamentaux de l’Union européen offre une nouvelle base aux revendications des femmes de l’UE. Juridiquement contraignante depuis le traité de Lisbonne de 2007, son article 23 proclame que « l’égalité entre les hommes et les femmes doit être assurée dans tous les domaines, y compris en matière d’emploi, de travail et de rémunération. Le principe de l’égalité n’empêche pas le maintien ou l’adoption de mesures prévoyant des avantages spécifiques en faveur du sexe sous-représenté« .
  • 2005-2006 : La Charte européenne sur l’égalité entre les hommes et les femmes dans la vie locale est rédigée par le Conseil des communes et régions d’Europe (CCRE). Elle pose six principes fondamentaux que les collectivités territoriales signataires s’engagent à mettre en œuvre.
  • 2010 : Une directive instaurant un congé parental minimum entre en vigueur dans tous les pays de l’Union européenne.
  • 2019 : La directive sur l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée est publiée et entrera en vigueur en 2022, laissant aux Etats Membres trois ans pour l’appliquer. Elle remplace la directive instaurant un congé parental afin de moderniser le cadre juridique européen existant. L’objectif est d’instaurer un congé de paternité pour les pères/ seconds parents, de renforcer le droit existant à 4 mois de congé parental, et entend in fine remédier à la sous-représentation des femmes sur le marché du travail.
  • 2019 : Ursula von der Leyen devient la première femme présidente de la Commission européenne.

La nouvelle stratégie européenne en faveur de l’égalité femmes-hommes

  • 2020 : La Commission européenne a dévoilé sa stratégie sur cinq ans en faveur de l’égalité femme-homme. L’objectif principal est de réussir à intégrer cette égalité dans tous les domaines d’action de l’UE ». Plusieurs mesures concrètes sont annoncées, parmi lesquelles l’extension des domaines de criminalité aux violences sexistes et sexuelles (harcèlement, maltraitance, mutilations génitales…).
  • 2021 : Annoncé comme un des premiers chantiers de la stratégie en faveur de l’égalité femme-homme, la Commission européenne propose une directive pour la transparence des salaires afin de renforcer l’application du principe de paie égale à travail égale.
  • 2021: Afin de mieux suivre les progrès réalisés dans l’ensemble de l’UE, la Commission lançait le 5 mars un portail de suivi de la stratégie en faveur de l’égalité hommes-femmes. Ce portail, élaboré conjointement par le Centre commun de recherche de la Commission et l’Institut européen pour l’égalité entre les hommes et les femmes (EIGE), permettra de suivre les performances des 27 États membres de l’UE et de les comparer entre elles.

Des avancées mises à mal par une crise sanitaire qui renforce les inégalités

Le Parlement européen a publié une infographie sur l’impact du Covid-19 sur les femmes. Le constat est fait que les progrès réalisés au cours des dernières années dans le domaine de l’égalité hommes-femmes risquent d’être considérablement réduits par la crise sanitaire. C’est ce qu’annonçait David Sassoli lors de l’ouverture de la réunion animée par la présidente de la commission des droits des femmes et de l’égalité des genres Evelyn Regner (S&D, AT) le 4 mars 2021 :

« La pandémie n’a pas seulement accru les inégalités existantes, elle risque aussi d’anéantir des décennies de réalisations. Les mesures adoptées pour contenir la propagation du virus ont souvent exacerbé le fossé entre les genres. Pour que la vie des femmes fasse un pas en avant et non un pas en arrière, nous devons parvenir à une véritable égalité. Il est temps de mettre un terme à la rhétorique et d’aller de l’avant ». 

Les femmes en première ligne pour lutter contre la pandémie

Les femmes sont beaucoup plus touchées par la crise que les hommes. Dans l’Union européenne, environ 76% des travailleurs de la santé sont des femmes. Cependant, les chiffres varient fortement d’un pays de l’UE à l’autre (88% en Lettonie contre 53% à Malte). De plus, les femmes sont surreprésentées dans les services essentiels, tels que les secteurs de la vente ou la garde d’enfants, qui ont continué leur activité durant la pandémie. Dans l’UE, 82% des caissiers et 95% du personnel de nettoyage ou d’aide à domicile sont des femmes.

En outre, les femmes sur le marché du travail ont été durement touchées par la pandémie : les femmes sont également très présentes dans les secteurs les plus touchés par la crise (commerce de détail, hôtellerie, soins et travaux domestiques), car ces emplois ne peuvent pas être exercés à distance. Elles ont également eu davantage de difficultés à réintégrer le marché du travail lors de la reprise partielle de l’été 2020, où les taux d’emploi ont augmenté de 1,4 % pour les hommes, mais seulement de 0,8 % pour les femmes entre les deuxième et troisième trimestres 2020.

Augmentation des violences contre les femmes

Un autre problème majeur causé par la crise, les violences faites aux femmes se sont aggravées dans les pays du monde entier. Suite au différents confinements et aux restrictions qui ont empêché certaines femmes d’obtenir l’aide dont elles avaient besoin, le nombre de féminicides et violences domestiques en Europe a considérablement augmenté. Par exemple, le nombre de signalements de violence domestique en France a augmenté de 32 % au cours de la première semaine du confinement, et de 20 % en Lituanie au cours des trois premières semaines. En Irlande, le nombre d’ordonnances émises pour protéger les victimes de violence domestique a été multiplié par cinq, et en Espagne, les autorités espagnoles ont fait état d’une augmentation de 18 % des appels aux services d’aide au cours de la première quinzaine de confinement.

 

Photo : M. Sassoli, Mme Ardern, Mme Harris et Mme von der Leyen ont rendu hommage aux femmes en 1ère ligne dans la crise du COVID-19. © EU 2021-EP

Rédacteur : CRIJ/EUROPE DIRECT
Date création : 09/03/2021
Mots clés : femmes, l’égalité entre les femmes et les hommes, TFUE, UE